Les inquiétudes du "parrain" de l'intelligence artificielle (Edito)
Monde Numérique03 mai 2023x
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Les inquiétudes du "parrain" de l'intelligence artificielle (Edito)

Pionnier de l'intelligence artificielle, le chercheur Geoffrey Hinton a quitté Google pour alerter sur les "risques de l'IA pour l'Humanité". Une prise de position alarmiste qui ne fait pas l'unanimité. 

On le surnomme « le parrain de l’IA » car il est l’un des pionniers de la recherche en intelligence artificielle. Âgé de 75 ans, Geoffrey Hinton est un ponte de la recherche en IA. Il a même reçu en 2019 le prix Turing, la plus haute distinction en informatique, pour ses travaux sur les réseaux de neurones, à la base de beaucoup de systèmes d’IA actuels

Geoffrey Hinton n'a rien à reprocher à Google, mais il explique dans une interview au New York Times et une autre en vidéo à la BBC, qu'il veut retrouver sa liberté de parole. Selon lui, « les futures versions de cette technologie pourraient être un risque pour l’humanité ». Au point même qu’il regrette d’y avoir consacré sa vie entière. 

Le risque d'une IA généraliste

Pourquoi Geoffrey Hinton est-il si inquiet ? Le chercheur fait allusion notamment au très médiatisé ChatGPT. Selon lui, les chatbots pourront bientôt dépasser « le niveau d'informations détenu par un cerveau humain ». Les grands modèles de langage, comme GPT-4, sont autant de cerveaux artificiels partagés qui apprennent séparément mais qui pourront bientôt partager leurs connaissances. « C'est comme si vous aviez 10 000 personnes et chaque fois qu'une personne apprenait quelque chose, tout le monde le savait automatiquement » explique-t-il à la BBC.

A court terme, dit-il encore, l'IA va apporter beaucoup plus d'avantages que d’inconvénients. Mais à plus long terme, les risques seraient énormes.  Derrière cela, se profile le rêve – ou le cauchemar –de ce que l’on appelle une Intelligence Artificielle Générale (IAG). Ce que craint surtout le chercheur, ce sont les « mauvaises » utilisations de l’IA. Il évoque le scénario d’une IAG entre les mains d’un Vladimir Poutine, par exemple, auquel cela pourrait donner un pouvoir surdimensionné afin de mener à bien toutes sortes de plans.

Cette étonnante confession de Geoffrey Hinton rappellerait presque les regrets de Robert Oppenheimer, le père de la bombe atomique, qui démissionna et exprima son épouvante après Hiroshima et Nagasaki. 

Pessimistes contre optimistes 

Voilà qui rallume les craintes évoquées récemment dans la fameuse pétition réclamant un moratoire sur l’IA, signée par plusieurs milliers de personnes, dont des scientifiques et des personnalités comme Elon Musk ou le chercheur québécois Joshua Bengio. Pour autant, les experts sont divisés. D'autres, comme le Français Yann Le Cun, laissent entendre que l'on s'affole pour rien et que l'IA va nous apporter bonheur et prospérité. On a donc deux camps : les pour et les contre, les optimistes et les pessimistes.

Tous, en tout cas, appellent à plus de régulation des applications à base d'intelligence artificiel.

La question de fond est la suivante : comment faire pour que l’IA ne soit pas la bombe atomique de demain ? Comment poursuivre la recherche en IA sans aller vers l’apocalypse que certains nous prédisent ? C’est probablement l’un des plus grands défis des années à venir.

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