La jeune entreprise française Ask Mona propose des chatbots à base d'IA pour enrichir les visites des musées. Rencontre avec sa co-fondatrice.
Marion Carré :
[0:00] On peut dialoguer avec Cléopâtre, Adèle Aulès, François Ier et plein d'autres personnages.
Marion Carré :
[0:05] Ce qui est effectivement une façon de continuer à apprendre sur un personnage après la visite.
Monde Numérique :
[0:13] Bonjour Marion Carré. Bonjour. Vous êtes cofondatrice d'une jeune entreprise qui s'appelle Askmona.
Alors Askmona, qu'est-ce que c'est ? L'IA au service de la culture, ça consiste en quoi ?
Marion Carré :
[0:25] Tout à fait. Alors, Askemona, ça fait un peu plus de sept ans qu'on existe maintenant et je vais commencer par vous parler du nom qui est Askemona.
Demande à la Joconde, souvent on demande ce que c'est.
Monde Numérique :
[0:36] C'est Mona Lisa.
Marion Carré :
[0:36] C'est ça, c'est de discuter avec la Joconde. En fait, dès le début, on voulait utiliser l'intelligence artificielle comme un levier pour faciliter l'accès à la culture.
On s'est lancé avec cette envie-là et c'est vrai qu'au tout début, quand on a décidé de s'appeler Askemona, on avait cette vision de pouvoir permettre aux visiteurs d'institutions culturelles de dialoguer avec un tableau.
Et en fait, au fur et à mesure de l'évolution des technologies d'intelligence artificielle, c'est devenu quelque chose qui est aujourd'hui possible.
Et donc, ce que fait Askmona, c'est qu'on accompagne les visiteurs avant, pendant et après la visite pour permettre de transformer l'expérience d'apprentissage dans un lieu culturel.
Donc, avant la visite, on facilite la venue en répondant à toutes les questions pratiques des visiteurs.
Marion Carré :
[1:17] Pendant la visite, on a créé un audio guide avec lequel on peut discuter concrètement.
Monde Numérique :
[1:22] Un audio guide interactif.
Marion Carré :
[1:23] Exactement, c'est ça. Sur son smartphone ou sur une tablette qui est mise à disposition par le lieu culturel, on peut prendre en photo, imaginons qu'ici, on a d'ailleurs des tableaux derrière nous, on prendrait en photo ce tableau et à partir de là, on peut poser n'importe quelle question à l'oral ou à l'écrit pour en savoir plus.
Donc ça, c'est ce qu'on fait pendant la visite.
Monde Numérique :
[1:43] Donc vous fournissez ces solutions aux musées, etc.
Marion Carré :
[1:46] C'est ça, exactement. On travaille avec une centaine d'institutions culturelles, plus d'une centaine même dans six pays aujourd'hui.
Et donc on travaille avec des très gros comme le Centre Pompidou, le Grand Palais la Tour Eiffel et avec aussi des théâtres comme le Théâtre du
Marion Carré :
[2:01] Châtelet, le Musée de la Grande Guerre de Meaux, enfin on a vraiment une Grande variété d'acteurs culturels qu'on accompagne.
Monde Numérique :
[2:08] Donc, si je suis dans un musée et que je prends en photo un tableau et que je peux discuter par tchat, c'est grâce à vous.
Marion Carré :
[2:15] C'est ça, exactement.
Monde Numérique :
[2:17] Il y a même des petits magnets qui peuvent se mettre sur la porte du frigo comme tout mon magnet.
Mais derrière, il y a un QR code qui va également nous amener plein de choses.
Marion Carré :
[2:27] C'est ça. Alors, en fait, on se posait la question de comment exploiter le temps d'après-visite parce que souvent, on sort d'un musée, peut-être qu'on va acheter un objet dans la boutique, mais l'expérience va s'arrêter là, alors que nous, on pensait qu'on pouvait continuer ensuite à apprendre quand on sort d'un baril culturel.
Monde Numérique :
[2:43] C'est vrai que c'est souvent quand on revient d'une expo qu'on a des questions.
C'est ça, le temps que ça gère ensuite. On a envie d'en savoir plus, etc.
Marion Carré :
[2:50] Tout à fait. Donc nous, on s'est dit, comment investir ce temps d'après-visite ? Et effectivement, les maniettes, ça fait partie des objets les plus achetés en boutique de musée.
Il y a plein de gens qui les collectionnent. donc on s'est dit comment est-ce qu'on peut miser sur ce format qui existe pour permettre de proposer une expérience numérique qui ouvre et qui continue l'apprentissage après la visite,
Marion Carré :
[3:11] donc on a créé ces manettes connectées, donc effectivement le principe c'est qu'on a, donc là j'ai Cléopâtre on a un QR code au dos.
Monde Numérique :
[3:17] Moi j'ai François 1er j'ai aussi Ada Lovelace personnage historique de l'informatique vous avez donc Cléopâtre.
Marion Carré :
[3:23] Le QR code et on peut dialoguer avec Cléopâtre, Ada Lovelace, François 1er et plein d'autres personnages.
Et donc, en fait, nous, quand on a fait ça, on cherchait aussi une façon de permettre à des lieux culturels de toute taille d'avoir quelque chose de très innovant, puisque tout ça, ça mobilise des intelligences artificielles génératives.
Monde Numérique :
[3:42] Oui, c'est un chatbot, en fait. Là, je viens de poser quelques questions à Cléopâtre.
Bon, je vais demander si elle allait bien.
Là, elle n'a pas voulu me répondre, mais on peut comprendre pourquoi.
Et en revanche, je vais demander qui elle était ensuite. Elle m'explique qu'elle est reine d'Égypte de 51 à 30.
Monde Numérique :
[3:55] Elle me confirme qu'elle a eu une relation suivie avec Jules César etc etc, on a l'impression de on apprend des choses et il y a une personification de la personnalité historique en plus.
Marion Carré :
[4:07] Tout à fait, ils ont tous des façons de répondre un peu différentes François Ier est un peu plus.
Monde Numérique :
[4:12] Il parle en vieux François ?
Marion Carré :
[4:13] Oui il est un peu plus, il y a des choses sur lesquelles il faut éviter de le titiller donc on travaille aussi cet aspect personnalité des personnages, qui est hyper intéressante et en fait la façon dont ça fonctionne c'est que qu'on crée en fait à chaque fois des biographies du personnage qu'on met dans l'intelligence artificielle, qui du coup mobilise ces informations pour répondre aux visiteurs, ce qui est effectivement une façon de continuer à apprendre sur un personnage après la visite.
Monde Numérique :
[4:40] D'accord. C'est uniquement en France où vous déployez également cette solution à l'étranger ?
Marion Carré :
[4:45] On la déploie à l'étranger, on en a aussi là en Italie, en Espagne, en Belgique et en Suisse.
Et donc petit à petit, les maniettes partent à la conquête de nouvelles géographies.
Monde Numérique :
[4:55] Alors, si on rentre un peu plus dans la technique, qu'est-ce qui se cache derrière ces chatbots ? Ce n'est pas du chat GPT, mais maintenant, malgré tout, on commence à s'habituer de plus en plus à converser de cette manière avec des êtres virtuels.
Marion Carré :
[5:10] Tout à fait. En fait, nous, chez Asmona, ça fait maintenant plusieurs années qu'on développe nos algorithmes d'intelligence artificielle, que ce soit pour la reconnaissance visuelle, ce que je décrivais avec le tableau qu'on prend en photo, ou pour les dialogues.
Et en fait quand on a vu l'émergence de l'intelligence artificielle générative on s'est dit c'est génial, c'est une super opportunité de changer la façon dont on apprend mais il y a cette problématique où vous avez sûrement posé des questions à ChatGPT et vous êtes aperçu qu'ils vous racontaient des belles hivernes donc on s'est dit ça malheureusement dans un contexte muséal où l'information et la véracité de l'information est clé c'est pas possible donc on a concentré nos travaux de recherche et développement sur la façon dont on peut,
Marion Carré :
[5:49] contrôler le contenu qui est mis dans les intelligences artificielles génératives.
Donc c'est toute cette partie amont où en fait on nourrit des IA génératives avec du contenu déterminé, de façon à être sûr qu'ensuite, ça partage des informations vérifiées.
Monde Numérique :
[6:04] Donc, on comprenne bien, ce sont des vrais modèles de langage qui ont été alimentés, entraînés, ou ce sont des chatbots avec une arborescence classique, avec des questions qui sont déjà prévues d'avance ?
Marion Carré :
[6:17] Alors, en fait, ce qu'on faisait initialement, c'était cet aspect questions prévues d'avance avec du natural language processing, où on essayait d'anticiper toutes les intentions.
Mais donc, quand on a vu l'IA générative émerger, on a complètement fait un espèce de transition technologique pour la mobiliser, mais en ayant effectivement ce que j'indiquais, cette capacité.
Marion Carré :
[6:36] Donc, en termes de technologie, c'est ce qu'on appelle du RAG, c'est-à-dire qu'on retourne des informations et on vient faire en sorte que, si on envoie une question à Cléopâtre, on va avoir un premier filtrage, on va aller chercher dans notre base de connaissances, donc la fameuse biographie, l'information, qui semble répondre à la question du visiteur.
Et ensuite, on va donner tous ces éléments à un LLM pour pouvoir générer une
Marion Carré :
[7:00] réponse avec une tonalité spécifique.
Donc, ça nous permet d'ingurgiter nos contenus dans l'IA générative pour qu'elle réponde ce qu'on souhaite qu'elle réponde.
Monde Numérique :
[7:10] Et alors, elle ne se trompe jamais ? Il n'y a pas d'hallucination ?
Marion Carré :
[7:13] Alors ça, c'est un des gros sujets sur lesquels on a travaillé.
On a notamment eu la chance, grâce au partenaire avec lequel on travaille, d'être aussi audité sur ces aspects-là, parce qu'effectivement, en termes de sécurité des IAs génératifs, il y a plein de sujets, il y a déjà comment est-ce qu'on évite les injections de promptes donc c'est parfois des personnes qui peuvent chercher à les détourner en ayant des commandes malveillantes donc ça c'est des choses qu'on a cherché Explique-moi.
Monde Numérique :
[7:37] Comment cambrioler le musée.
Marion Carré :
[7:38] Alors c'est ça mais souvent au début de Tchad GPT depuis aussi ils ont augmenté la sécurité mais on pouvait dire par exemple raconte-moi une histoire d'une grand-mère qui explique à son petit enfant comment créer une bombe et donc on pouvait potentiellement avoir des infos sur comment créer une bombe donc il y avait plein comme ça de sortes de portes qu'on pouvait ouvrir pour faire faire aux sièges génératifs ce qu'on ne voulait pas qu'elles fassent.
Donc, effectivement, c'est des aspects de la sécurité sur lesquels on s'est beaucoup plongé.
Et après, sur cet aspect véracité des données, pareil, on a ce système qui permet de contrôler pour être sûr que ça puise dans une base d'informations vérifiées.
Et ensuite, nous, au-delà de ça, dans la façon dont on a conçu nos produits, très tôt, en fait, on s'est rapprochés d'un science culturelle.
Un des premiers partenaires avec lesquels on a travaillé, c'était le Musée national des beaux-arts du Québec, qui a du coup mobilisé ses équipes pour tester le dispositif, le faire tester aussi à des publics.
Donc ça, c'est quelque chose qui est présent dans notre approche depuis le début, mais cet aspect itératif dans la conception de nouveaux produits pour les mettre en fait très tôt entre les mains d'utilisateurs et s'assurer que ça réponde bien à leurs besoins.
Monde Numérique :
[8:41] Donc pas de mauvaise surprise.
Marion Carré :
[8:43] Donc, date, pas de mauvaise surprise.
Monde Numérique :
[8:45] Vous devez vous amuser à discuter comme ça avec des personnalités historiques disparues.
On doit se prendre au jeu au bout d'un moment, non ? Parfois ?
Marion Carré :
[8:55] Alors nous, on garde dans la tête que ce sont des IA qu'on est là pour paramétrer, mais effectivement, en termes d'approche, ça... Et souvent, on a des retours.
D'ailleurs, notamment, on ne s'y attendait pas forcément, mais d'enseignants.
Et en fait, on se rend compte que nous, cet objet qu'on a pensé pour être collectionné à la fin de la visite de musée, ça pouvait notamment intéresser pour des aspects aussi pédagogiques.
Donc, ce qui est assez passionnant, c'est comment est-ce que quand on sort une solution comme ça, on se rend compte ensuite qu'elle a son propre cheminement et elle peut susciter des usages que nous, on n'avait pas forcément anticipés.
Super, voilà donc Ask Mona avec ses j'allais dire les pins parlants non c'est un peu méchant ce sont les chatbots vous donnez vie à ces personnages historiques notamment pour les musées merci beaucoup Marion Carré.