Michel Lévy-Provençal, prospectiviste chez Brightness et organisateur des conférences TEDx Paris, évoque les transformations technologiques à venir cette année, notamment l'émergence de l'intelligence artificielle générale. Il évoque également des scénarios pour l'Europe face au reste du monde dans le contexte techno-politique actuel.
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En 2025, la fameuse IA générale fera-t-elle son apparition ? En tout cas, l'IA devrait atteindre cette année un niveau tel qu'elle pourrait réaliser près de 90 % des tâches humaines, facilitant ainsi l'automatisation de nombreux processus quotidiens. Des modèles comme ceux d'OpenAI ou les initiatives d'Elon Musk, tels que DeepSeek ou Grok, témoignent de cette évolution rapide. Tout récemment, ChatGPT Tasks permet aux utilisateurs sans compétences techniques de gérer leurs activités quotidiennes grâce à des instructions en langage naturel, transformant ainsi l'interaction entre humains et IA au sein des entreprises et dans le secteur public.
Quels enjeux pour l'Europe ?
Dans ce contexte d'accélération technologique, Michel Levy-Provençal envisage deux scénarios pour 2035 : une « Europe forteresse » qui pourrait établir des normes éthiques rigoureuses en matière d'IA, ou une Europe dépassée par l'innovation américaine, compromettant ainsi sa souveraineté.
Transcription :
Invité :
[0:01] On est en train d'entrer dans une période où il y a un point d'inflexion. C'est-à-dire qu'on voit une accélération très, très, très forte des capacités de raisonnement de ces intelligences artificielles et en même temps des produits, des technologies qui apparaissent sur le marché, notamment des agents intelligents.
Monde Numérique :
[0:22] Intelligence artificielle, réalité augmentée, robots humanoïdes, de quoi sera faite l'année 2025 ? Eh bien, pour le savoir, je suis heureux de recevoir dans cet épisode Michel Lévy-Provençal, prospectiviste chez Brightness, organisateur des conférences TEDxParis et animateur du podcast TED en français. Bonjour Michel.
Invité :
[0:41] Bonjour Jérôme.
Monde Numérique :
[0:42] Ravi de vous recevoir à nouveau dans Monde Numérique. Michel, vous observez les grandes tendances en matière de technologie. Vous avez publié plusieurs articles sur ce qui nous attend en 2025. Alors projetons-nous dans le futur. Quelles sont les thématiques à surveiller en particulier ? Que va-t-il se passer ?
Invité :
[1:03] Apparemment, c'est l'intelligence artificielle, encore cette année. Et avec une question que beaucoup se posent, c'est de savoir si 2025 sera l'année, la fameuse année où l'intelligence artificielle générale, c'est-à-dire ce moment
Invité :
[1:16] où l'intelligence artificielle dépasse l'intelligence humaine. Il y a beaucoup de débats sur le sujet en termes de définition, mais disons que cette intelligence artificielle qui sera capable de réaliser 90% des tâches réalisé par un humain sera réel en 2025.
Invité :
[1:35] Et alors, le pari qu'on peut faire, c'est qu'on regarde, quand on regarde vraiment les faits et les données, on voit l'évolution, particulièrement ces derniers mois, de plusieurs modèles d'intelligence artificielle. Je pense à ceux d'OpenAI, je pense à un modèle chinois qui s'appelle DeepSeek, je pense à XAI, la startup de Elon Musk avec Grok et la prochaine version et GROC 3, on est en train d'entrer dans une période où il y a un point d'inflexion. C'est-à-dire qu'on voit une accélération très très très forte des capacités de raisonnement de ces intelligences artificielles et en même temps des produits, des technologies qui apparaissent sur le marché, notamment des agents intelligents, Là, aujourd'hui, d'ailleurs, au moment où on enregistre, OpenAI a annoncé ce matin un nouveau produit grand public qui s'appelle ChatGPT Tasks, qui est, pour le moment, l'embryon de ce que pourrait être une série d'outils pour créer des agents. En gros, ça permet de créer des tâches gérées par ChatGPT et qui sont pré-programmées pour vous offrir des réponses, des réalisations de tâches plus ou moins complexes.
Invité :
[2:48] À un horizon temporel donné. Par exemple, vous pouvez dire, tous les matins, tu me fais une revue de presse, sur, je ne sais pas, la géopolitique, par exemple, et tous les matins, à 7h30 du matin, tu m'envoies une notification via ChatGPT et je veux lire cette revue de presse. Eh bien, avec ChatGPT Tasks, on est capable de le faire. Donc, c'est un agent très simple, mais ces agents vont se démultiplier dans les mois qui viennent, partout, dans différents produits, à tel point qu'on peut se demander si ces agents ne pourront pas remplacer un certain nombre d'humains dans des tâches, qui sont pour l'instant réalisées plutôt par des cols blancs et donc atteindre dans les faits cette fameuse intelligence artificielle générale. J'ai bien conscience que je fais beaucoup de raccourcis de ce que je dis là, mais si 2025 est l'année où ça apparaît, ça va être une véritable révolution économique, sociale, potentiellement politique.
Monde Numérique :
[3:39] On va parler justement des implications et des conséquences un peu politiques de tout ça. Ces agents en fait c'est la suite de la démocratisation de l'IA parce qu'on peut déjà faire énormément de choses avec des algos d'intelligence artificielle mais là ça veut dire que ce sera vraiment dans les mains de monsieur et madame tout le monde très facilement, pas besoin de savoir programmer ce sera encore plus simple exactement.
Invité :
[4:02] Pour des experts qui ont pu développer des outils avec les modèles comme ceux qui sont proposés par OpenAI, l'éditeur de chat GPT, il est possible de développer ces agents depuis déjà plusieurs mois, voire plusieurs années. Moi, je manipule ce type d'agent parce qu'on a fait développer aussi par mon équipe des applications qui implémentent ces agents pour faire différentes choses, résumer des articles, générer des podcasts par exemple automatiquement, etc. Mais là, la grande révolution, c'est qu'on n'aura plus besoin de coder. C'est-à-dire que le commun des mortels, le néophyte, pourra aller dans chat GPT, demander en langage naturel de faire telle ou telle tâche et puis de programmer son agent. Et ça, c'est majeur comme révolution. OpenAI n'est pas le seul acteur. Nvidia a, au CES, annoncé toute une série d'outils qui permet assez simplement, alors, encore plus Aujourd'hui, ce n'est encore pas accessible au plus grand nom, mais on sent bien qu'avec l'évolution des interfaces, avec l'évolution du no-code, le no-code, c'est cette manière qu'on a de développer des applications sans avoir à maîtriser le code, eh bien, tout le monde va pouvoir le faire. Donc ça, c'est une vraie révolution dans l'entreprise, parce que ce n'est plus uniquement le département IT qui va être capable de déployer ces outils. Eh bien, c'est l'utilisateur lui-même, l'utilisateur final.
Invité :
[5:25] Et c'est passionnant. c'est révolutionnaire. C'est tout simplement révolutionnaire avec le temps qu'on va pouvoir gagner.
Monde Numérique :
[5:33] Dans l'entreprise, mais également les particuliers.
Invité :
[5:36] Bien sûr, les particuliers, les acteurs publics, je l'espère, parce qu'on a beaucoup à faire dans le domaine public aussi pour améliorer nos services publics qui peuvent bénéficier aussi de l'intelligence artificielle. Bien sûr, tout un chacun sera amené à potentiellement déployer son propre agent en dialoguant, parfois même sans écrire, juste en dialoguant par la voix avec l'intelligence artificielle.
Monde Numérique :
[6:02] Voilà, les fameux agents qu'on annonce depuis pas mal de temps et qui devraient donc se concrétiser en 2025.
Monde Numérique :
[6:08] Michel, il y a aussi peut-être l'avènement de la robotique, enfin pas l'avènement, mais est-ce que la robotique selon vous va franchir un nouveau cap Tesla par son robot humanoïde, on pourrait parler aussi de, figures AI, on a vu au CES de Las Vegas un certain nombre de choses robots plus intelligence artificielle ça y est là on est rentré dans je sais pas quoi.
Invité :
[6:35] C'est la convergence naturelle oui encore une fois c'est une tendance de long terme c'est à dire que ça n'est pas quelque chose qui vient d'apparaître prenons l'exemple de Tesla mais cette fois-ci dans le domaine de l'automobile autonome, l'autonomie aujourd'hui existe aux Etats-Unis avec ce que Tesla appelle le FSD, le full self-driving, non supervisé. C'est-à-dire que vous êtes derrière votre volant sans toucher le volant, sans toucher les pédales et votre voiture fait plusieurs centaines de kilomètres sans aucune intervention humaine. Ça, c'est ce qui marche aux États-Unis, pas encore en Europe. On l'espère bientôt en Europe pour les détenteurs de Tesla. Ce qui est en train de se passer, c'est qu'avec l'arrivée de l'intelligence artificielle générative, on va avoir de nouvelles intelligences artificielles, j'allais dire de nouveaux modèles, qui vont prendre comme données non pas des données textuelles ou des images ou du son ou de la voix pour s'entraîner, mais l'environnement physique. Autrement dit, elles vont s'entraîner sur la base.
Invité :
[7:35] De parcours de voiture, par exemple, dans une ville, ou potentiellement de robots humanoïdes dans des espaces qui peuvent être une usine dans un premier temps, et puis demain, notre chez-soi, notre maison, notre appartement, pour ensuite être capable d'être autonome et pouvoir réaliser des tâches, se déplacer, faire le ménage, peut-être pas forcément la cuisine, mais débarrasser la table, porter des poids, les courses par exemple. Et donc ça, c'est ce qu'on est en train de voir aujourd'hui. C'est ce sur quoi travaille Tesla avec Optimus, son robot humanoïde. Nvidia a annoncé aussi tout un programme, ils sont appelés Cosmos, pour entraîner des IA sur des données spatiales, donc des données de modification, de parcours dans l'espace physique plutôt. Et donc, peut-être pas en 2025, mais en tout cas, on est encore une fois sur ce moment où ça y est, on accélère. On accélère dans la courbe pour voir apparaître, probablement dans les cinq ans qui viennent, les premiers robots humanoïdes qui vont être capables d'être véritablement autonomes et de réaliser des tâches. Quant à dire qu'en 2030, on aura chez soi un Optimus ou un robot humanoïde, Je ne suis pas sûr que tout un chacun l'aura, mais on commence à avoir des early adopters qui auront acheté un robot humanoïde chez eux pour faire un certain nombre de tas. Ça, j'en suis convaincu, oui.
Monde Numérique :
[9:04] Michel Lévy-Provençal, il y a beaucoup d'interrogations en ce moment, dans ce contexte-là, sur la place de l'Europe, de la France et de l'Europe en particulier. Vous avez publié il y a quelque temps un article qui passe en revue et qui imagine deux scénarios concernant la place de l'Europe sur le plan de la souveraineté. C'est quoi ces deux scénarios ?
Invité :
[9:25] Oui, alors ce sont deux scénarios qui nous projettent en 2035. Et en essayant d'imaginer ce qui peut se passer entre aujourd'hui et 2035 donc avec deux voies radicalement opposées la première étant un premier scénario que j'ai appelé l'Europe forteresse, qui est probablement d'ailleurs le scénario sur lequel on est le plus engagé aujourd'hui, c'est-à-dire une Europe qui essaie d'être la plus souveraine possible, avec ses propres outils et qui maîtrise complètement de manière quasiment en autonomie, parfaite j'allais dire autocratique, mais en autarcie plutôt parfaite.
Invité :
[10:05] Sa technologie, son IA, ses données, etc. Donc, le premier scénario consiste à imaginer les différents événements qui
Invité :
[10:13] pourraient se passer entre 2025 et 2035. Donc, j'imagine un certain nombre d'événements majeurs. Premier événement qui aurait lieu en mars 2025, où on verrait un scandale. Un scandale parce que des données sensibles européennes ont été exploitées par les services américains et donc évidemment l'Europe réagit très fortement.
Invité :
[10:33] Se referme encore plus sur elle-même, accélère le lancement d'un cloud européen avec beaucoup d'investissements, 50 milliards d'euros pour le développer, avec une alternative souveraine au cloud américain. Et puis, différents projets qui commencent à se développer dans ce sens-là, une fusion entre Atos et Thales pour en faire un géant européen de la cybersécurité et peut-être aussi d'autres aux acteurs européens. Qtai, le fameux laboratoire d'IA qui a été lancé notamment par Xavier Niel qui fusionne avec Mistral, Alors, on ne sait pas encore exactement dans quelle forme, mais on entend, on sent bien la référence à OpenAI entre un modèle ouvert, fondation et un modèle bénéficiaire. En mars 2026, on a encore plus un phénomène d'enfermement de l'Europe dans ses frontières numériques avec l'adoption d'un Digital Sovereignty Act qui impose à tous les citoyens européens de traiter, stocker ces données en Europe exclusivement, ce qui n'est pas du tout le cas aujourd'hui. Et puis, une situation en 2035 où, j'accélère, mais en gros, l'Europe a gagné son pari et l'IA éthique est devenue un standard mondial. Et là, on a gagné notre pari. C'est extraordinaire, c'est fantastique.
Monde Numérique :
[11:57] Donc, ça marche. Super.
Invité :
[11:58] Ça marche. Malheureusement, on sent bien qu'on n'est pas vraiment sur cette voie parce que, pour une raison, pour une raison d'ailleurs qui est le démarrage du deuxième scénario, c'est qu'on est très en retard en Europe. Et c'est ce qui arrive dans le deuxième scénario. C'est le premier événement du deuxième scénario. En mars 2025, on accuse un retard majeur face à l'arrivée de l'AGI, l'intelligence artificielle générale dont je parlais tout à l'heure et qui est américaine. Et donc là, on se rend compte qu'il y a un choc économique, une onde de choc par le fait que les entreprises européennes prennent du retard et sont moins compétitives, tout simplement, que les entreprises du monde entier qui, elles, n'ont pas les mêmes contraintes que les Européens et qui adoptent les solutions américaines. Et donc là, on est en novembre 2025, l'Europe a pris conscience et elle décide de complètement changer de stratégie et elle rouvre les négociations avec les
Invité :
[12:53] Américains et un Digital Alliance Treaty est signé. Donc, on revoit complètement l'alliance. On resserre les liens économiques avec les États-Unis.
Invité :
[13:04] Et on considère, pour dire les choses très simplement, que les IA américaines et la technologie américaine est considérée comme souveraine en Europe. Alors, c'est vraiment quelque chose de vraiment très fort, c'est vraiment à 180 degrés de ce que Thierry Breton a essayé de faire pendant tant d'années. Et là, on commence à voir des résultats positifs. Microsoft qui commence à massivement investir, notamment dans l'IA médicale française, on parle de dizaines de milliards d'euros qui sont investis parce qu'on sait que la France est vraiment très avancée sur les sujets de santé. Il y a une simplification de la réglementation des données en Europe. Dassault Systèmes, qui est une pépite aussi chez nous, révolutionne grâce à beaucoup de technologies qui viennent des États-Unis, leurs plateformes dédiées au secteur nucléaire à base d'IA. On a, alors c'est peut-être plus anecdotique, mais c'est un bon exemple aussi, des marques comme Dior, comme Saint-Laurent, certaines marques du groupe LVMH qui créent des alliances avec des acteurs américains. Je pense à Dior et à Apple qui pourraient réinventer l'expérience client avec une IA émotionnelle. Bref, on est dans un tout autre paysage où là, en réalité, l'Europe et en particulier la France s'est appuyée sur ses forces, sur la base de technologies américaines pour construire, en tout cas pour intégrer un écosystème.
Invité :
[14:28] Où la France et l'Europe sont interdépendantes des Américains et pas totalement, autonome. Et ça crée cette interdépendance, elle vient du fait qu'elle a des forces, la France, qu'elle met en valeur dans cet écosystème et elle devient indispensable aussi aux autres acteurs de l'écosystème.
Monde Numérique :
[14:50] Pardon, c'est quand même un renoncement à la notion de souveraineté.
Invité :
[14:55] C'est un réalisme surtout. C'est-à-dire qu'aujourd'hui, soyons clairs, nous n'avons pas les moyens, financier de tenir la charge face à des acteurs qui dépensent, et des acteurs privés, qui dépensent des dizaines de milliards par an en R&D pour développer leur infrastructure ou leur technologie. Donc comment est-ce qu'on peut faire ? Évidemment, on a des pépites, évidemment, on a des qualités, évidemment, on a des génies chez nous en France. Évidemment que Mistral est un coup de génie fantastique parce que avec quasiment 100 fois moins de budget, on est arrivé à atteindre, alors pas vraiment, mais à atteindre le niveau de ce que faisait ChatGPT avec la version GPT-4, par exemple. Certains disent GPT-4O, mais on ne va pas rentrer dans les détails. Mais en gros, le problème, ce n'est pas tant d'arriver à atteindre le niveau auquel était OpenAI il y a un an, c'est d'arriver à rivaliser avec les acteurs actuels. Or, on n'a pas les moyens de le faire, surtout qu'eux continuent à avancer et à accélérer.
Invité :
[16:00] Donc, face à ça, je pense que c'est totalement irréaliste de penser qu'on sera autonome. Je pense qu'au contraire, on a tout intérêt à avoir une stratégie qui ressemblerait, par exemple, à celle de la Corée du Sud, d'une certaine manière aussi à celle d'Israël, qui consiste à s'appuyer sur des technologies pour développer des forces, qui nous rendent indispensables aux Américains. Il y a plein de sujets sur la santé, dans l'aéronautique, dans le nucléaire. Il y a plein de sujets sur lesquels on est fort. Dans la modélisation 3D, je pensais à Dassault Systèmes.
Monde Numérique :
[16:34] Donc une forme de donnant-donnant, en fait.
Invité :
[16:36] Oui, les experts appellent ça le dérisking aussi. C'est-à-dire faire en sorte de minimiser notre risque de dépendance, soit en trouvant d'autres alliés ailleurs pour être moins dépendants des Américains. Ça, c'est une forme de dérisking. Puis une autre forme de dérisking, c'est aussi de se rendre indispensable dans le maillon à tel point qu'ils ont besoin de nous autant qu'on a besoin d'eux. Mais pour l'instant, ils n'ont pas besoin de nous autant qu'on a besoin d'eux parce que toute l'énergie qu'on essaie de passer à les rattraper n'est pas une énergie qu'on essaie d'utiliser pour développer nos forces. Et ça, c'est vraiment préjudiciable.
Monde Numérique :
[17:13] Tout le paradoxe dans lequel on semble enfermé aujourd'hui Alors on dit que l'Europe a quand même des atouts et notamment la data, population européenne etc et puis l'énergie et notamment la France avec le nucléaire, c'est réaliste d'essayer de s'appuyer là-dessus et de valoriser tout ça ?
Invité :
[17:32] Il faut savoir une chose, c'est que l'IA l'un des fondamentaux de l'IA aujourd'hui c'est évidemment le matériel c'est-à-dire ces fameuses puces qui sont développées notamment par, Nvidia, mais pas que, parce qu'il y a de plus en plus de concurrences aujourd'hui qui arrivent sur le marché. Donc ça, c'est indispensable. Les matières premières aussi sont indispensables. Et puis, il y a une autre dimension, c'est l'énergie. Quand on pense que Microsoft, que les grands acteurs, sont en train de déployer des centrales nucléaires privées pour pouvoir alimenter leur data center. On imagine bien à quel point l'énergie est cruciale. Or, la France, en Europe, est à la pointe de l'énergie décarbonée et peu chère.
Monde Numérique :
[18:14] Et on en produit même beaucoup plus qu'on en consomme.
Invité :
[18:17] Et on en produit beaucoup plus qu'on en consomme. Donc, on a une force, là, avec le nucléaire, qu'on aurait tout intérêt à valoriser, à mettre en avant, à développer, plutôt que d'essayer de développer, nos propres modèles souverains, faisons en sorte, sur cette partie de l'infrastructure, de déployer des projets qui permettent d'être vraiment une valeur ajoutée dans l'ensemble de l'écosystème. Ça, c'est un moyen. Il y en a d'autres, mais c'en est un. Pour revenir juste à la question de la souveraineté, cette vision d'une autonomie complète, elle est totalement théorique parce que si on descend, par exemple, dans la chaîne de valeur, dans la stack, à un moment donné, on va tomber. Le premier choc, c'est quand on se dit Mais finalement, dans l'écosystème technologique, il y a un premier élément de la chaîne qui est l'operating system, c'est-à-dire Windows, Apple, même éventuellement Linux. Mais cette couche logicielle, on n'en est pas totalement souverain, à part peut-être Linux en partie et encore. On fait partie d'un écosystème global. Et puis, si on descend encore dans la chaîne, vraiment tout en bas de la chaîne, il y a des matières premières qui permettent de fabriquer, par exemple, des puces. Or, ces matières premières, on ne les a pas. Donc, quoi qu'il arrive, dans l'ensemble de la chaîne, on ne peut pas être autonome à 100%. Donc, il faut accepter cette dépendance. Mais il faut se donner les moyens aussi d'être assez forts pour que les autres soient dépendants de nous. L'énergie est un des moyens.
Monde Numérique :
[19:46] Oui. Cette souveraineté, finalement, apparaît comme une forme, d'une espèce d'utopie.
Invité :
[19:50] C'est une utopie, c'est la maladie de l'idéal française, connue, reconnue. Il faudrait arriver à se rendre compte à quel point on est en train de se tirer une balle dans le pied.
Monde Numérique :
[20:01] Merci Michel Lévy-Provençal. Revoyons-nous dans quelques mois pour refaire le point sur tout ça.
Invité :
[20:06] Avec grand plaisir, Jérôme.
Monde Numérique :
[20:07] Voilà. Je rappelle donc que vous êtes responsable du TEDxParis et les conférences, c'est bientôt là, les conférences TEDxParis.
Invité :
[20:16] Oui, le 11 février au Grand Rex.
Monde Numérique :
[20:18] Une.
Invité :
[20:19] Soirée sur un thème à la fois provocateur et en même temps plein d'optimisme peut-on jouir dans un monde qui va mal.
Monde Numérique :
[20:27] Écoutez en effet il y aura du grain à moudre merci beaucoup et puis on vous retrouve aussi dans le podcast officiel de TED en français merci Michel Lévy-Provençal merci Jérôme.