🎤 Interview - Ready for IT : Cybersécurité et souveraineté numérique : les nouveaux défis des DSI (Maria Iacono, Arnaud Philippe)
24 juin 202529:23

🎤 Interview - Ready for IT : Cybersécurité et souveraineté numérique : les nouveaux défis des DSI (Maria Iacono, Arnaud Philippe)

Les responsables informatiques des entreprises françaises sont confrontés à de nouveaux défis. Ils doivent notamment faire face au risque cyber dans un contexte national et international complexe.

En partenariat avec Ready for IT 2025

Interview : Maria Iacono, directrice de Ready for IT, et Arnaud Philippe, directeur qualité et sécurité chez Médiamétrie

Quel bilan tirez-vous de cette sixième édition de Ready for IT ?

Maria Iacono : L’édition 2025 a été marquée par une véritable effervescence. Les DSI ressentent encore un fort besoin d’échanger, de se retrouver. Ce n’est pas simplement un salon, c’est un lieu de respiration, surtout dans un contexte géopolitique tendu, une pression budgétaire croissante et des obligations réglementaires complexes. L'événement montre à quel point les préoccupations autour de la cybersécurité et de l’accompagnement des métiers dans leur transformation sont plus que jamais au cœur des priorités.

La cybersécurité reste un sujet brûlant pour les entreprises. Où en est-on ?

Arnaud Philippe : Le risque est omniprésent et quotidien. Chaque entreprise, chaque individu est une cible potentielle. La première faille, c’est l’humain. Il faut une sensibilisation constante. On ne vise pas le zéro défaut, mais la capacité à réagir vite. C’est un enjeu d’agilité. Et dans ce paysage, les DSI doivent non seulement défendre les systèmes, mais aussi collaborer avec les directions financières pour obtenir les moyens de leurs ambitions.

Comment évolue le rôle du DSI dans ce contexte ?

Maria Iacono : Le DSI n’est plus un simple centre de coût. Il devient un acteur stratégique, à la croisée du business et de la sécurité. Ce sont de vrais jongleurs aujourd’hui. Leur rôle s’est profondément transformé : il leur faut des compétences techniques, mais aussi économiques, managériales, pédagogiques. Cette nouvelle génération de DSI est passionnante par sa capacité à sortir de son cadre initial pour devenir moteur de performance.

Arnaud Philippe : La clé, c’est le dialogue. Notamment avec les DAF. Quand il existe, les projets avancent. Mais cela dépend de la culture managériale. Les entreprises les plus performantes sont celles où les silos tombent, où le dialogue est fluide. C’est un facteur de compétitivité et de résilience.

Où en est-on des questions de souveraineté numérique et de réglementation ?

Maria Iacono : Le sujet de la souveraineté n’est plus théorique. Il y a eu un vrai déclic cette année. On ne se repose plus uniquement sur l’Europe : chaque entreprise commence à prendre ses responsabilités. On exige de savoir où vont nos données. Il y a un changement de posture, plus mature, plus responsable.

Arnaud Philippe : On voit émerger des acteurs français crédibles sur le cloud, même si les géants américains gardent une avance significative. La réglementation européenne avance aussi, comme avec le RGPD ou NIS2. Mais il faut qu’elle soit appliquée rapidement pour rester pertinente. Il y a un vrai travail à faire pour transformer cette ambition en levier économique réel.

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arnaud philippe: [0:01] On est aussi, chaque entité économique, de même que chaque individu, est aujourd'hui une cible potentielle pour les hackers, pour ceux qui veulent récupérer de la donnée. arnaud philippe: [0:12] Toutes les données ont de la valeur, c'est un marché, c'est un business et il faut en être conscient aussi pour voir quels sont les investissements à un moment donné qu'il faut faire pour protéger cette valeur, pour protéger ses assets. Monde Numérique : [0:34] Bonjour Maria Iacono. maria iacono: [0:35] Bonjour. Monde Numérique : [0:36] Ravi de vous recevoir à nouveau. Vous êtes directrice de Ready for IT, enfin Ready for IT, on peut dire également. maria iacono: [0:43] Librement. Monde Numérique : [0:44] Il y a un jeu de mots. maria iacono: [0:44] On l'a compris. Le jeu de mots est bien compris. Monde Numérique : [0:46] Exactement. Événement qui a eu lieu à Monaco du 20 au 22 mai 2025. Et puis à mes côtés, à nos côtés également, Arnaud Philippe, bonjour. arnaud philippe: [0:54] Bonjour. Monde Numérique : [0:55] Vous êtes directeur qualité et sécurité chez Médiamétrie. arnaud philippe: [0:58] Absolument. Monde Numérique : [0:58] L'Institut de sondage. Et vous êtes membre du comité éditorial de l'événement, donc associée de très près à l'organisation et au déroulé de ce Ready for It. Sixième édition, comment ça s'est passé, Maria ? maria iacono: [1:11] Beaucoup d'effervescence, beaucoup de besoins. Le bilan est assez dense. On a vraiment senti ce besoin de se retrouver encore plus. Et c'est triste quelque part parce que ce besoin n'est toujours pas comblé quelque part. Monde Numérique : [1:24] Oui, parce que vous êtes là. maria iacono: [1:26] Le constat est là de cette effervescente et positive, mais quelque part, c'est-à-dire que les besoins sont encore là. Monde Numérique : [1:32] Alors, les besoins qui sont surtout exprimés par les DSI, ce qu'on appelle les responsables informatiques dans les entreprises, c'est à ces besoins-là leurs préoccupations que vous vous êtes fixés, que vous souhaitez répondre, c'est tout l'enjeu de cet événement. Monde Numérique : [1:49] Sachant qu'il y a différents enjeux, quels sont-ils ? maria iacono: [1:54] La coupe est pleine. Tout d'abord, on part d'un constat géopolitique, si on veut prendre largeur, un constat géopolitique très intense, très complexe. On ne va pas y revenir en détail, ce n'est pas le rendez-vous, mais c'est le point de départ. Monde Numérique : [2:08] Oui, il y a eu des droits de douane, etc. maria iacono: [2:12] Suivi, cette semaine, ces jours-ci, j'ai l'impression qu'on oublie, mais on a quand même démarré l'année avec une grosse crise financière. On a parlé de vraiment guerre économique quand même, donc un contexte budgétaire très compliqué. Suivi tout ça avec un enjeu de cybersécurité, C'est croissant de plus en plus, surtout sur les ETI, les entreprises de taille intermédiaire, qui sont vraiment la cible, qui ont l'intérêt pour Ready for It. Et dans tout ça, avec un contexte réglementaire loin d'être limpide. Monde Numérique : [2:44] Et bien voilà, vous avez tout énuméré. Donc, je vous propose qu'on passe un petit peu tout ça en revue, qu'on évoque toutes ces problématiques. Et puis, avec vous également, Arnaud, puisque vous êtes aux premières loges. Ça s'est bien passé, ce salon. Contact intéressant avec les DSI, vous les sentez inquiets ? arnaud philippe: [3:02] Inquiets ? Je ne sais pas s'il faut dire inquiets. Ils ont plein de points d'interrogation. Et je crois que c'est ça qu'il faut retenir. C'est qu'aujourd'hui, on a un horizon qui est... Monde Numérique : [3:18] Qui n'est pas bouché, mais qui est un peu... arnaud philippe: [3:20] Qui est un peu encombré. Un peu encombré, oui. Autant la brume était très loin les années précédentes, autant là elle s'est bien approchée et réussir à se projeter est parfois un peu compliquée. Ça veut dire que ça demande beaucoup d'agilité dans la manière dont on va aborder les problématiques et une adaptabilité quasi constante. Donc voilà, il faut avoir des épaules et des reins un petit peu solides pour arnaud philippe: [3:46] assumer les missions qui sont les nôtres aujourd'hui. Monde Numérique : [3:50] Alors, notamment, parmi la pression qui pèse sur ces ETI, il y a la cybersécurité, ce qu'on appelle le risque cyber. Il n'y a pas une semaine qui s'écoule sans qu'on évoque un piratage, une fuite de données, etc. Est-ce que les entreprises françaises parviennent à faire face à cette pression ? Je ne dis pas le risque, il est omniprésent, mais ça devient vraiment une pression quotidienne, en fait. arnaud philippe: [4:15] C'est une pression quotidienne. c'est aussi le corollaire, c'est aussi la nécessité d'avoir une sensibilisation constante de l'ensemble des équipes à ce risque. On sait que le premier vecteur, de la réalisation d'un risque, c'est le vecteur humain. Monde Numérique : [4:35] C'est le maillon faible. C'est nous le maillon faible. arnaud philippe: [4:37] On est tous potentiellement le maillon faible. On est tous susceptibles à un moment donné d'avoir le mulot un peu rapide et de cliquer quand il ne faut pas. Et donc, il y a une nécessité de sensibilisation, d'acculturation de l'ensemble des collaborateurs sur la bonne réaction à avoir. Il n'y a pas de il n'y a pas de zéro défaut, il n'y a pas de risque zéro. L'idée, c'est que chacun agisse prudemment et si jamais on se retrouve face à un risque, à ce moment-là, d'avoir la bonne réaction et la réactivité qui convient pour éviter, pour, arnaud philippe: [5:20] circonscrire vraiment l'incendie qui a pu être allumé. Monde Numérique : [5:24] Au cours du salon en Monaco, il y a notamment Benoît Grunemwald qui est intervenu de ESETC, qui en plus est un habitué de monde numérique. Alors, suite à cette intervention, ou d'une manière générale, quel est le principal risque aujourd'hui pour les entreprises ? C'est quoi ? C'est ce que vous disiez ? C'est le muleau qui clique un peu trop vite ? C'est donc faire rentrer le loup dans la bergerie, etc. ? arnaud philippe: [5:45] Exactement. Ça, ça n'a pas changé. Ça, ça n'a pas changé. Après, et je reviens sur le contexte géopolitique dont Maria parlait, et les développements des derniers jours ne peuvent que nous inciter bien évidemment à la prudence, on est aussi, chaque entité économique, de même que chaque individu, est aujourd'hui une cible potentielle pour les hackers, pour ceux qui veulent récupérer de la donnée. Toutes les données ont de la valeur, c'est un marché, c'est un business et il faut en être conscient aussi pour voir Quels sont les investissements, à un moment donné, qu'il faut faire pour protéger cette valeur, pour protéger ses assets ? maria iacono: [6:27] Cela, dans un contexte, on revient à la fameuse guerre économique, cela, dans un contexte, dans une année si compliquée comme la nôtre, où les budgets se sont restreints de plus en plus, les choses se compliquent. Parce qu'on a, d'un côté, nos décisions, d'un côté, les obligations de couper des coûts, mais la menace, elle croît de plus en plus. Et le contexte géopolitique économique s'embrase dans l'histoire parce que les mêmes entités de hackers peuvent travailler pour un dictateur et en même temps faire leur business comme une vraie société. On en avait parlé dans un des épisodes passés sur le côté business, cette savoir-faire business que nos hackers ont acquis tout récemment. Monde Numérique : [7:09] Donc dans les entreprises, c'est le DSI qui se retrouve en première ligne face à ce risque-là et il a besoin de moyens. Donc qu'est-ce qu'il fait ? Il va avoir le directeur administratif financier, le DAF, il lui dit « j'ai besoin d'argent ». Et là, c'est là où ça coince. maria iacono: [7:21] Ça serait trop simple comme ça, surtout. Surtout, il faut se remettre l'église au milieu du village. Le DSI, aujourd'hui, il ne peut plus être juste en centre de coût. Et donc dire « Ah bah toc toc, j'ai besoin de dépenser tot et tot pour me défendre », il contribue à la marge de l'entreprise. Il a un rôle de plus en plus vraiment dans la gestion économique au sein de l'organisation. Donc ça serait trop simple de dire toc toc j'ai besoin d'un budget, ce n'est plus comme ça on n'est pas seulement sur la défensive en fait il doit, Arnaud parlait d'agilité moi je parlais en plus de l'agilité, d'être. maria iacono: [8:01] Multi-task il doit d'un côté accompagner de plus en plus les métiers pour les rendre plus performants parce que la poussée technologique pousse la concurrence et donc il ne faut pas se faire larguer, entre guillemets, excusez-moi pour l'expression, par les concurrents. Donc, l'EDSI y contribue avec le business, avec le métier, à rendre l'entreprise plus performante, mais en même temps, il doit gérer la pression de la menace qui croît de l'autre côté. Donc, c'est un jongleur. maria iacono: [8:31] Je voudrais élire cette nouvelle. C'est un jongleur. C'est une nouvelle une nouvelle compétence ? De mon observation, ce que j'observe beaucoup les communautés des événements que je gère, c'est une communauté passionnante, et passionnée bien sûr, par sa capacité à avoir développé en si peu de temps, sous les dernières années, ses compétences, un soft skill justement, de partir d'une formation très souvent ingénieur, à vraiment passer au cap business, entrepreneurial, marketer, d'avoir cette capacité. Et c'est, pour moi, cette poussée, cette génération de DSI, mais aussi qui ont cette poussée, cette capacité de sortir de l'acquis, d'ingénieurs, à pouvoir se projeter à vivre différemment ce métier. Ça peut faire peur, il faut l'avouer. arnaud philippe: [9:24] Et je crois que ce que nous a montré, en tout cas, ce que nous ont montré un certain nombre d'interventions au cours de Ready for IT, c'est aussi le fait que le DSI, ou les équipes SI, si on veut généraliser, ont, Si ce n'est l'obligation, au moins la nécessité de construire, tisser une relation au quotidien, notamment avec les partenaires financiers de l'entreprise. Il y a une nécessité d'avoir un dialogue. Monde Numérique : [9:53] Ils arrivent à avoir le même discours ? arnaud philippe: [9:56] Alors, de mieux en mieux. Après, bien évidemment, ça dépend de l'économie de la société dans laquelle vous êtes. Une société qui est très orientée tech, si à un moment donné, le directeur financier ne sait pas ce que l'entreprise fait, c'est un peu compliqué. Donc, dans ces sociétés-là, généralement, le dialogue est plus facile. Dans d'autres entités où le cœur de business n'est pas forcément la tech, là, c'est un petit peu plus compliqué. Et ça demande, là, au DSI, de développer une compétence pédagogique vraiment poussée pour pouvoir, à un moment donné, convaincre et, in fine, avoir les budgets nécessaires au projet de son entité. Monde Numérique : [10:37] Oui, et on retombe sur ces impératifs d'agilité. Il faut être en phase avec les technologies, il faut avoir une vision, à la fois des opportunités, des risques, etc. Et puis, savoir sensibiliser en fait en interne, c'est ce que vous dites. arnaud philippe: [10:51] Exactement, il faut sensibiliser et il faut vraiment que le DSI et le DAF se parlent régulièrement, échangent. Et on est vraiment là dans le tissu social de l'entreprise et la manière dont les entités, dont les hommes se parlent à un moment donné au quotidien pour faire comprendre leurs enjeux et, arnaud philippe: [11:14] in fine, mieux travailler en ce moment. Monde Numérique : [11:16] Alors, quand ça ne se passe pas aussi bien, quand ce n'est pas le cas, qu'est-ce que vous pouvez donner comme conseil l'un et l'autre ? maria iacono: [11:22] Démissionnel. Je rigole, je rigole. Disons que pour regarder le verre, la partie à moitié pleine dans toutes ces situations il faut aussi se dire que dans ce contexte, sociétal, géopolitique, où il y a eu l'invasion des attaques, ce qu'il faut retenir de positif, c'est que les attaques aux parties les plus faibles de notre société, notamment les hôpitaux, ont quand même aidé à la sensibilisation de notre société, donc des acteurs au sein des organisations, donc les collaborateurs, donc les DAF. Donc, il y a quand même une maturité qui s'est mise en place suite aux accidents. Monde Numérique : [12:03] Voilà, que les attaques répétées contre les hôpitaux et leur médiatisation aussi, parce que ça a été très médiatique. maria iacono: [12:08] Oui, la médiatisation. Monde Numérique : [12:11] Finalement, il y a quand même un aspect bénéfique, positif, c'est que ça a contribué à la sensibilisation. maria iacono: [12:16] Comme tous les phénomènes, il y a toujours, bien évidemment, et je ne souhaite pas sous-estimer, bien évidemment, les dégâts qui ont été faits à chaque incident, bien évidemment. Monde Numérique : [12:26] Oui, on s'en serait passé. maria iacono: [12:27] Mais il est important aussi de retenir qu'il y a eu une maturité qui s'est mise en place. L'acculturation dont Arnaud parle, on a eu un élan grâce à cela. Et ça aide les échanges, ça aide la mise en place de nouvelles mentalités. Monde Numérique : [12:48] Qu'est-ce qui se passe ? Quelle est la différence entre, pour ce problème-là, entre les petites entreprises et les plus grosses, ou les petites qui grandissent ? Est-ce qu'on arrive à conserver cette fluidité, finalement ? Une start-up, vous l'avez dit, les gens peuvent se parler, en plus, ils sont tous la même culture, etc. Évidemment, enfin, en théorie... Maria, vous faites... Oui, parce qu'en fait. maria iacono: [13:09] Encore une fois, tout dépend de secteur. Si on parle de start-up de tech, moi je suis assez proche des start-up, bien évidemment, de ce qui est IT et surtout cybersécurité. Des petites structures, c'est la base de leur métier. Alors, bien évidemment, c'est un autre constat. Mais si on parle d'entreprises qui sont plutôt... Enfin, si on revient au tissu des PME, le tissu qui fait partie vraiment de nos régions et qui sont vraiment... Redifo est née par une volonté de coup de gueule des régions de CDSI qui sont isolés, qui font partie d'un réseau très important pour notre société et qui n'ont pas accès aux mêmes moyens que le reste. Donc oui, c'est très important de citer que ça vient de là, ça vient d'un vrai besoin qui n'est pas comblé à date. Sinon, il n'y aurait pas cette tension et cet effervescent, ce besoin d'échange qu'on a constaté sur place. Monde Numérique : [13:57] Arnaud ? arnaud philippe: [13:57] Mais sinon, pour répondre à la question, je crois que c'est vraiment une question de culture d'entreprise et de management. C'est-à-dire qu'à un moment donné, vous avez soit un top management qui facilite les échanges et qui organise son entreprise pour que les échanges soient fluides, soit vous avez des gens qui construisent, alors c'est de moins en moins le cas, mais qui maintiennent des silos en place et la construction de ces silos et le degré hermétique de ces silos bloquent à un moment donné le dialogue. Et la conséquence, bien évidemment, c'est une faiblesse probablement cyber de l'entreprise en question et puis, in fine, bien évidemment, un retard. Le... Time to market aujourd'hui, il est aussi lié au fait qu'en interne, dans le management de l'entreprise, on a la possibilité de se parler et d'avancer tous dans la même direction avec le même état d'esprit, la même volonté. arnaud philippe: [14:58] Donc, c'est une question de management, c'est une question de culture d'entreprise. maria iacono: [15:02] Et il y a un vrai changement. J'ai démarré à ce poste il y a six ans où on était à la première édition de Ready for It. Et à l'époque, le DC était dans son coin. Le RSC, encore plus, c'était vraiment dans leur coin. C'était les techniciens qui faisaient tourner les machines quelque part. Mais en cinq ans, certes, on en a vu des choses, le monde n'est plus le même. Mais quelle évolution ! Quelle évolution qui a été apportée ? Monde Numérique : [15:33] Alors, le risque cyber, évidemment, prégnant, très important. Et puis, il y a aussi les contraintes, on l'a évoqué au début, extérieures, géopolitiques, etc. Et notamment, cette tarte à la crème, je dirais, de la souveraineté, la souveraineté numérique. maria iacono: [15:48] Qui était très, très, très, très loin de nous. Monde Numérique : [15:50] Oui, c'était loin. Aujourd'hui, ça y est, les entreprises sont de plus en plus disent, bon, OK, il y a un problème. Il faut qu'on soit souverain. Il faut qu'on veille sur nos données, etc. Maintenant, comment on fait quand les seules offres de cloud que j'ai face à moi, c'est Google, Amazon ? maria iacono: [16:04] En fait, j'ai vraiment observé encore une fois Arnaud en tant qu'acteur qui sera la meilleure proposition pour expliquer tout cela. Moi, encore une fois, j'observe de par mon poste, on est passé, ne serait-ce que de la cinquième édition à la sixième édition de Ready for It, un changement de posture sur ce sujet, complètement différent. Jusqu'en l'année dernière, on commençait à s'étiller parce que historiquement, bon, de toute façon, l'Europe ne fait rien, de toute façon l'Europe ne fait rien, on n'a rien à disposition, négocier les contrats, on ne peut rien faire, et tout s'arrêtait là. maria iacono: [16:38] Et les mois, les mois sont passés. Et aujourd'hui, en fait, il y a vraiment, encore une fois, un changement de posture. Il y a plus de conscience. C'est non seulement une prise de conscience, c'est carrément un changement de posture, de responsabilité. En fait, aujourd'hui, on est plutôt en mode, on se dit, en fait. maria iacono: [16:57] Peu importe si l'Europe bouge ou pas, nous sommes responsables, d'où nous mettons les données. Mais nous avons à donner, nous, là, à demander à nos prestataires où est-ce que cette data que je possède de mon entreprise et qui est vraiment mon propre patrimoine, où est-ce qu'il va ? D'exiger d'avoir cette responsabilité. En fait, c'est comme si tout d'un coup, il y a eu l'électrochoc en début d'année, vraiment, suivi par les tensions géopolitiques en disant, en fait, nous avons, nous, une responsabilité, même dans les moindres structures, parce qu'on ne peut pas juste laisser faire. Donc, ça, c'est vraiment un changement de posture que j'ai remarqué à l'espace de 12 mois. Monde Numérique : [17:35] Oui, donc une entreprise. maria iacono: [17:36] Arnaud, tu pourras, bien évidemment. arnaud philippe: [17:37] Je crois que ce qui était tarte à la crème aujourd'hui est en train de devenir un vrai chemin de pensée dans la construction. Monde Numérique : [17:50] Une valeur d'entreprise, quasiment. arnaud philippe: [17:52] Presque une valeur d'entreprise, absolument. Et un nouveau Graal, quelque part. Alors, comme tout Graal, on ne l'attrape jamais. Mais c'est bien ça, le sujet aujourd'hui. C'est de se dire, quels sont les outils que j'ai à ma disposition pour maîtriser ma data ? Quels que soient les acteurs... Monde Numérique : [18:13] Alors, est-ce qu'ils existent, ces outils, justement ? arnaud philippe: [18:15] Alors, il y a des acteurs nationaux qui émergent, qui commencent à proposer... Monde Numérique : [18:21] Là, c'est votre casquette médiamétrie, pour le coup. arnaud philippe: [18:25] Et c'est ma casquette de Ready for It qui a échangé avec différents partenaires et différents homologues. Oui, il y a des offres qui commencent à émerger. Oui, elles sont de plus en plus sérieuses, elles sont de plus en plus solides. maria iacono: [18:45] Et il faut les soutenir. arnaud philippe: [18:47] Et il faut les soutenir. Il faut les encourager. Monde Numérique : [18:49] On parle de cloud, on parle d'applicatifs aussi, d'outils de communication interne. arnaud philippe: [18:54] Etc. Après, je pense qu'il faut être réaliste. Si tous les acteurs économiques français décident demain de rapatrier toute leur data uniquement chez des acteurs français, ça ne tiendra pas. Monde Numérique : [19:10] Ça ne tiendra pas ? C'est-à-dire qu'on n'a pas les ressources ? En quantité ou en qualité ? arnaud philippe: [19:14] Les deux. Par contre, l'offre est de plus en plus importante, la possibilité de le faire est de plus en plus importante. Je pense qu'on a des acteurs qui sont de plus en plus solides sur le marché pour accueillir et rapatrier de l'information. Mais c'est quelque chose qui va prendre du temps. On a des acteurs essentiellement arnaud philippe: [19:33] américains qui ont trois, quatre longueurs d'avance quand même sur le sujet. Et à un moment donné, même si on ne veut pas qu'ils soient incontournables ou que l'on tourne la tête, ils sont là et l'offre n'est pas si inattractive que ça. Simplement, aujourd'hui, ils sont estampillés américains et on sait, toutes les tensions... Qu'il y a aujourd'hui autour de... maria iacono: [19:56] Les espoirs dans tout ça, c'est aussi d'imaginer des négociations différentes aussi au niveau international avec ces acteurs, où il n'y aurait pas tout ce monde qui se braque, où il y aurait ceux qui comprennent la posture de nos, organisations européennes, du coup, de travailler avec. Et donc, d'arrêter, du côté des gars, arrêter cette structure, dire, nous sommes les rois du pétrole, et c'est comme ça. Il va y avoir... Monde Numérique : [20:23] Ils sont en train de réagir. maria iacono: [20:24] Ils sont en train de passer à la contre-attaque. Monde Numérique : [20:27] Et d'ailleurs, avec un petit peu de, je ne sais pas comment on peut appeler ça, de souveraineté washing, non ? maria iacono: [20:32] Oui, bien sûr. Monde Numérique : [20:33] De s'associer avec des acteurs locaux. maria iacono: [20:35] C'est une manière de bouger. Monde Numérique : [20:37] Oui, mais est-ce qu'un cloud Amazon ou Google, sur le contexte qu'il est associé à un acteur européen, devient un cloud souverain ? maria iacono: [20:46] Je pense que des progrès sont en cours et seront de plus en plus, seront faits, justement, pour avoir un partage du monde plus équitable. Parce qu'on arrive à un point de nos retours parce que sinon, chacun reste chez soi et on va dans la caverne. Certes, il y a les rois du pétrole, comme je disais, mais le monde économique est complexe et varié. Et je pense que se couper de l'Europe ne convient à personne. Mais je pense qu'on s'arrêtera là sur ce sujet. Monde Numérique : [21:14] Non, mais c'est vrai qu'on oppose souvent, j'ai l'impression, au fil des interviews que je peux faire à droite ou à gauche, on oppose les États-Unis à la France pour cette question de souveraineté, mais on ne parle pas de l'échelon européen entre les deux. maria iacono: [21:26] Parce que chaque pays membre, malheureusement, joue malheureusement, joue sur son propre jeu. Il n'y a pas une unité. C'est le constat. C'est pour ça que le retard n'a jamais été rattrapé jusque-là. Le constat est triste. arnaud philippe: [21:41] L'ambition de l'Union européenne sur le papier est très forte. La traduction aujourd'hui, Peine à se faire. Soyons clairs. Après, il y a des choses qui vont dans le bon sens. arnaud philippe: [22:00] Il y a une volonté de réglementation. Monde Numérique : [22:03] Pourtant, on est super fort en réglementation. arnaud philippe: [22:04] On est super fort en réglementation. On essaie quand même, et il faut reconnaître ça aux législateurs européens, de créer un espace qui soit le plus sûr possible pour l'ensemble des acteurs. Maintenant, la manière dont on va pouvoir faire de cet espace sur un avantage concurrentiel et une réalité va prendre du temps et va prendre de l'énergie à l'ensemble de ceux qui participent à la création de cet espace. Monde Numérique : [22:37] Entre ce qui peut se discuter à l'échelon européen et puis ce qui devient effectif au niveau des entreprises, il y a des délais, il y a de la distorsion, il y a des... arnaud philippe: [22:47] Il y a des délais, il y a de la... Monde Numérique : [22:49] Vous avez un exemple ? arnaud philippe: [22:54] Regardez juste le RGPD, qui a maintenant quand même presque 10 ans. Le RGPD, on a déjà dit, 2016, et full application et full enforcement en 2018. Donc, il y avait déjà cette conscience qu'en deux ans, il fallait que tout le monde se mette à peu près au carré sur le sujet. Donc, on voit bien... Monde Numérique : [23:18] Donc, ça, c'est un bon exemple ? arnaud philippe: [23:20] C'est un très bon exemple. On voit bien en plus que... Ça a été... Monde Numérique : [23:24] Il n'y a pas eu deux ans, mais ça a bien marché à l'arrivée. arnaud philippe: [23:26] Mais ça a bien marché. On voit que les principes de cette réglementation sont quand même repris dans plusieurs pays, notamment ceux qui ont quitté l'Union européenne, qui, dans leur traduction législative nationale, ont repris quand même un certain nombre de grands principes du RGPD. Donc, on voit bien qu'il y a une pertinence dans ce que l'Union européenne met en place. Après, cette pertinence-là, il faut l'accompagner d'un dynamisme qui permette de faire en sorte que les délais ne soient pas trop longs pour avoir quelque chose qui soit un petit peu solide et sur lequel on puisse, nous, acteurs économiques, vraiment s'appuyer. maria iacono: [24:08] C'est là le problème. C'est ce deuxième dynamisme économique où il n'y a pas une seule autoroute à prendre tous ensemble, mais il est multiple parce que les besoins économiques sont locaux, malheureusement et différents d'un pays à l'autre. Là, le nerf du sujet est là et ça ne sert à rien d'attendre. Cette différence, cette diversité entre les États ne va pas s'effacer. Monde Numérique : [24:35] En termes de réglementation, on parlait tout à l'heure de cybersécurité, il y a le NIS2, là. Où est-ce qu'on en est de ce truc-là ? Je dis ce truc-là. arnaud philippe: [24:42] Alors, ce truc-là est une directive. Donc, qui dit directive ? À la différence du règlement, le règlement est d'application directe. La directive nécessite une transcription en droit national. Donc, nous attendons que l'Assemblée nationale française, il y a un texte qui est en circulation entre l'Assemblée et le Parlement, mais que le texte définitif de transcription de Nice 2 soit définitivement voté par le Parlement. Monde Numérique : [25:11] Et là, on n'a pas de visibilité, pas d'échéance. arnaud philippe: [25:13] Et alors, aux dernières nouvelles, mais peut-être les choses ont-elles changées dans les dernières heures ? Non, la visibilité n'est pas très très claire, et je ne crois pas que... Ce sujet soit à l'agenda de la session extraordinaire qui s'annonce. Donc, voilà. Après, le gouvernement gère ses priorités, on peut tout à fait entendre qu'il y en ait d'autres. Néanmoins, il y a d'autres pays qui sont plus avancés que nous dans la transcription. Je crois que je vais dire des bêtises, donc je vais m'abstenir. Excusez-moi, mais il y a des pays qui ont avancé un petit peu plus vite. Il y en a qui ne sont pas plus avancés que nous, mais on voit bien qu'à un moment donné, si on veut qu'une législation ait une efficacité, il faut aussi qu'elle soit mise en place. Et il faut aussi qu'elle soit mise en place rapidement, parce que plus on tarde, moins elle est... Pour une législation, ça va faire un peu bizarre, mais moins elle est time to market. Donc moins elle est pertinente par rapport à l'environnement dans lequel elle a été construite. Monde Numérique : [26:20] Ça, on le voit un peu avec l'AI Act sur l'intelligence artificielle, non ? On a conçu un... On a été très, très rapide à légiférer. Du coup, on a serré la vis à mort et puis on s'aperçoit aujourd'hui qu'on l'a peut-être un peu trop serré et que ce n'est pas très bon pour les startups IA européennes. On est dans ce cas-là. Vous avez du pain sur la planche, messieurs, dames. maria iacono: [26:42] Il y a du boulot. Monde Numérique : [26:44] Il y a du boulot, en effet. Est-ce que, malgré tout, ce contexte, même contraint, peut être moteur d'opportunité ? Monde Numérique : [26:52] Quels sont les points positifs à tirer de tout ça ? maria iacono: [26:54] Quand Arnaud parlait de toute cette panoplie de législation, moi, je trouve que les législations, pour y revenir dessus, c'est positif quand ça aide, quand on s'oblige à faire des choses qui vont pousser en avant une entreprise en secteur. Donc, il y a des législations qui sont nécessaires parce que tant qu'elles sont dans un push vraiment d'aller de l'avant, tout va. Je dis toujours, c'est ce dynamisme économique, malheureusement, qu'il faut booster. Au niveau européen, il n'y aura pas un seul et unique dynamisme économique parce que les besoins de chaque pays sont particuliers. Mais je pensais en écoutant Arnaud, vraiment, parce qu'il faut revenir sur les choses positives quand même qui ont été faits. J'ai l'impression qu'on ne parle plus de France 2030, qui a quand même été un vrai levier. Je ne veux pas revenir sur les critiques du projet, mais n'oublions pas que ce projet a quand même permis à pas mal... Je reviens au start-up français. On est un pays qui est tellement effervescent en créativité. Ça a quand même permis de lancer pas mal de projets, d'aider pas mal de jeunes entrepreneurs, dans le numérique, dans la cybersécurité, donc je fais un appel un appel pour qu'on soutienne ce genre de projet qu'on certes... Monde Numérique : [28:13] Il faudrait un petit update de France 2030. maria iacono: [28:15] Absolument. Prochain rendez-vous à Renewal 2026. Mais non, mais c'est vrai, parce qu'il faut vraiment ne pas oublier dans tout ce qui est les besoins réglementés, il ne faut pas oublier l'économie, c'est les marchés qui mènent nos organisations, qui mènent nos sociétés et ces projets-là il faut les booster de plus en plus. Il faut les admirer parce que ça donne l'incérent à avoir des esprits du numérique qui ne partent pas chez les autres. Monde Numérique : [28:46] Autre sujet. La fuite des cerveaux. Le vaste sujet qu'on aura, qu'on ne va pas aborder juste maintenant. Merci beaucoup à tous les deux. Merci Maria Iacono, directrice de l'événement Ready for It édition 2025. On se retrouve en 2026. maria iacono: [29:02] Dans un an, tout juste. Monde Numérique : [29:05] Et Arnaud Philippe, directeur qualité et sécurité chez Médiamétrie et puis membre du comité éditorial de l'événement Reliphory. maria iacono: [29:12] Pour toi. arnaud philippe: [29:13] Merci beaucoup.
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