Alors que Meta lance son nouveau réseau social Threads, la question de laisser tomber Twitter se pose plus que jamais. Mais est-ce si facile ?
Depuis le rachat de Twitter par Elon Musk, de nombreux problèmes ont surgi, incitant certains à envisager de quitter la plateforme : augmentation des contenus haineux, absence de modération, récentes limitations imposées aux utilisateurs. D'autres plateformes comme Mastodon, Bluesky, et le nouveau réseau social Threads de Meta, sont des alternatives. Mai, les utilisateurs cèderont-ils aux sirènes de la nouveauté ? Twitter demeure un lieu de débat public irremplaçable. Malgré leurs défauts, les grandes plateformes restent très addictives et il n'est pas facile de s'en défaire.
Transcription
Depuis le rachat de la plateforme de microblogging par Elon Musk, la question revient régulièrement sur le tapis.
Il faut dire que ce ne sont pas les raisons qui manquent. On dirait que tout va mal depuis que le patron de Tesla et SpaceX a mis la main sur le petit oiseau bleu. Augmentation du nombre de contenus haineux et extrémistes, quasi-absence de modération, badge bleu payant et non plus certifiant sans oublier les nouveautés du week-end dernier : l’obligation de se connecter pour lire les messages sur le Web et la limitation du nombre de tweets lisibles chaque jour, 10 000 pour les comptes vérifiés, 1 000 pour les utilisateurs non vérifiés et 500 pour les nouveaux comptes. En tout cas, jusqu’à nouvel ordre.
Ce n’est pas tout. Il y a aussi la personnalité d’Elon Musk qui n’a plus la côte auprès de certains. Ses saillies surprenantes, son management à la serpe, ou ses accointances avec la droite populiste et même complotiste américaine. Même le prénom Elon ne fait plus recette et est en baisse dans les classements des prénoms donnés aux nouveaux-nés.
Bref, la tentation d’un ailleurs n’a sans doute jamais été aussi vive.
Mais quitter Twitter pour aller où ? Certes, il existe des alternatives. Il y a Mastodon, vers lequel se sont tournés certains utilisateurs de Twitter il y a déjà plusieurs mois en faisant mine de claquer la porte, mais beaucoup d’entre eux, en réalité, sont toujours chez Musk.
Il y a Bluesky, lancé par le fondateur de Twitter, Jack Dorsey. Qui n’est rien d’autre qu’un Twitter-like sympathique mais sans grand intérêt pour l’instant car très peu peuplé. Il y a notamment très peu de francophones. Et il faut bien dire qu’on s’ennuie un peu sur Bluesky.
Il y a aussi le nouveau réseau social Threads, lancé ce mercredi 6 juillet, en tout cas aux États-Unis et en Grande-Bretagne, par le géant Meta. Un concurrent direct de Twitter. Avec le même système de minimessages, et qui s’appuie directement sur Instagram, afin de maximiser dès le départ ses chances de réussite.
Mais est-ce suffisant pour faire vraiment peur à Twitter ?
Bon, c’est vrai, Elon Musk a l’air un peu inquiet face à Threads. Il est même remonté comme une pendule contre Mark Zuckerberg, au point de le défier aux arts martiaux. Donc, c’est sans doute qu’il craint un peu de voir ses utilisateurs partir par millions vers son concurrent, alors même qu’il tente de remettre en route la machine à cash en recollant les morceaux et les annonceurs.
Mais a-t-il vraiment raison de s’inquiéter ?
Certes, l’histoire nous a appris que les réseaux ne sont pas éternels. De Myspace à Skyblog, qui vient de fermer ses portes tout récemment. De grands noms du numérique ont touché le fond après avoir crevé les plafonds. En même temps, cette même histoire nous a aussi montré que l'on ne déloge pas si vite les plus anciens. Google n’a jamais réussi à faire de l’ombre à Facebook avec Google+. Sans oublier les éphémères Vine, Periscope et autres Clubhouse.
En fait, il n’est pas facile pour les utilisateurs de quitter un réseau social. Seules quelques personnalités ont claqué la porte de Twitter pour de bonnes raisons, après s’être fait harceler. Tout récemment encore, le musicien Ibrahim Maalouf a quitté pour un tweet maladroit. Mais pour le commun des mortels, c’est plus compliqué. Twitter reste un espace public mondial où des millions de personnes partagent des idées et des informations. Beaucoup craignent de perdre ce lien si elles se tournent vers des réseaux sociaux moins populaires.
On ne change pas de réseau social comme on change d’épicerie.
Si Elon Musk a réussi quelque chose, c'est quand même d'avoir rendu sa plateforme encore plus addictive. C’est terrible, mais la polémique, l’indignation, voire la violence verbale, ça fatigue et pourtant on en redemande. En outre, les déçus de la personnalité d’Elon Musk ont-ils vraiment envie d’aller chez Mark Zuckerberg ?
Même s’ils ont des défauts et des concurrents, Facebook, Instagram, Twitter… restent au sommet. Les désagréments ne suffisent pas à détourner les utilisateurs. Même les Facebook Files et l’affaire Cambridge Analytica n’ont pas fait chuter massivement le trafic de Facebook. Ce qui lui a fait plus de mal, c’est le désintérêt des plus jeunes et la concurrence d’Instagram, Snapchat et surtout TikTok, qui proposent des expériences carrément différentes.
La force de Twitter est d’être le média de l’instant et du débat public. Un autre outil proposant exactement la même chose peut-il vraiment lui faire de l’ombre ? La grande règle du premier arrivé a rarement été démentie. La question est surtout de savoir ce qui pourrait remplacer Twitter en termes de temps de cerveau disponible, mais pas tellement de savoir si l’on pourrait vraiment faire mieux.
Inversement, qu'est-ce qui pourrait retenir les utilisateurs sur Twitter ? Peut-être un engagement sérieux pour régler les problèmes existants et améliorer l'expérience utilisateur, en améliorant la modération notamment.
En fin de compte, la question de savoir si l'on doit quitter Twitter dépend de ce que l'on recherche dans un réseau social. Pour certains, les problèmes de la plateforme l'emporteront sur ses avantages. Pour d'autres, la possibilité de se connecter et de partager des idées avec un public mondial l'emportera sur tout le reste.